En 2005, une société monégasque lance sur le marché un portable destiné aux enfants de 4 à 8 ans, le Babymo. Il est mis en rayon dans les magasins Carrefour et BHV. En nous appuyant sur les conseils de sagesse émis par le Professeur Stewart, responsable, en Grande-Bretagne, de l’expertise sur la téléphonie mobile, Priartem et Agir pour l’environnement interviennent auprès de ces deux sociétés et obtiennent le retrait de la vente.
Poursuivi par la société distributrice de ce produit les associations gagnent leur procès, le jugement reconnaissant la légitimité de leur action.
Le Babymo débouté !
Le juge des référés a rejeté, le 25 mars, le recours du distributeur du Babymo, la société monégasque ITT, contre les associations Priartem et Agir pour l’environnement. Le distributeur avait assigné les associations à la suite des actions que celles-ci avaient lancées et qui avaient abouti au retrait de la vente du portable pour jeunes enfants par les deux principales sociétés commercialisant ce produit : Carrefour et le BHV. Le Juge a considéré que « les associations ont assumé leurs devoirs de prudence et n’ont pas manqué de mesure dans l’expression de leurs critiques ».
La motivation de cette ordonnance, face aux accusations de dénigrement et d’agressivité émises par ITT, est très intéressante.
Le Juge ne se contente pas de dire qu’il « n’y a pas lieu à référer » , il ajoute « qu’en effet, les associations étaient en droit, sans pour autant se substituer aux pouvoirs publics seuls habilités à évaluer le risque sanitaire et prendre, s’il y a lieu, toutes dispositions en conséquence, de s’informer pour alerter en particulier ceux-ci sur cette question. »
La légitimité de nos actions sur ce dossier se trouve donc confortée par ce jugement. ITT a annoncé par voie de presse qu’elle avait l’intention de poursuivre au fond. C’est ce qui s’appelle s’obstiner et s’enferrer pour une bien mauvaise cause. Rappelons que la société anglaise qui commercialisait le même produit en Grande Bretagne, a décidé, suite à la publication du rapport Stewart, de retirer purement et simplement le produit de la vente. Nous saluons ici les sociétés Carrefour et BHV qui, suite à nos actions, ont décidé, elles aussi, de retirer le Babymo de la vente.
Nous poursuivons nos actions en vue d’obtenir que la vente de portables spécifiquement destinés aux jeunes enfants soit interdite sur le territoire national.
Rappel des faits :
En fin d’année 2004, nous apprenons qu’était mis en vente, en Grande-Bretagne, un portable spécifiquement destiné aux enfants de 4 à 8 ans, que sa commercialisation était également annoncée en Belgique et en France.
Cette annonce tombait alors même que nous venions à peine de prendre connaissance des résultats inquiétants de Karolinska (La Lettre Priartem n°14/15) dont le caractère préoccupant pour la santé publique se trouvaient confortés, au début du mois de janvier, par les conclusions du programme de recherche REFLEX et surtout par la prise de position du Professeur Stewart. Celui-ci, auteur d’un premier rapport sur la téléphonie mobile en 2000, puis d’un nouveau rapport, publié en janvier 2005, constate que « l’on ne peut plus dire en 2005 ce que l’on disait en 2000 et que l’on n’a, jusque là, sans doute sous-estimés les risques liés à la téléphonie mobile ». Lors de la communication de ses nouvelles recommandations à la presse, il déconseillait formellement l’usage du portable par les jeunes enfants.
Avec l’association Agir pour l’Environnement, nous décidons alors d’alerter, une nouvelle fois, le Ministre de la Santé en lui demandant de prendre immédiatement des dispositions visant à interdire la commercialisation de ce portable pour enfant en France, de lancer une campagne d’information sur les risques potentiels liés à l’usage du portable et de définir, au plus vite une règlementation réellement protectrice de la santé des usagers du portable et des riverains d’antennes. Cette lettre demeure aujourd’hui encore sans réponse.
Pourtant, depuis cette lettre datée du 19 janvier 2005, le portable pour enfant a fait l’actualité (près d’une centaine d’articles de presse). En effet, alors même que le distributeur de ce produit en Grande-Bretagne, décidait, suite aux recommandations du Professeur Stewart, d’en cesser la distribution, une société monégasque (ITT) décidait de le diffuser en France sous le nom de Babymo. Carrefour, tout d’abord, le BHV, ensuite, le mettaient en vente dans leurs rayons spécialisés suivis par des sociétés de vente par Internet. Priartem et Agir lancent alors une campagne d’information/dissuasion vis-à-vis des deux chaînes commerciales qui décident l’une après l’autre d’interrompre la vente en application du principe de précaution..
Cependant, le silence des autorités publiques encourage le distributeur à défendre coûte que coûte son produit. La meilleure défense étant l’attaque, il décide d’attaquer les deux associations en justice, dans le cadre d’une procédure d’urgence (un référé), pour « trouble manifestement illicite ».
Comme nous l’avons indiqué plus haut, les associations ont gagné cette manche judiciaire, réussissant même à obtenir une condamnation de la société monégasque à leur rembourser leurs frais d’avocat. Nous espérions que le volant judiciaire de cette affaire allait s’arrêter là et que la société ITT allait renoncer à poursuivre cette affaire sur le fond. Les arguments scientifiques récents ne lui étant décidément pas en sa faveur elle a finalement suivi l’exemple de son homologue britannique en retirant définitivement ce produit de la vente.
Depuis le rapport Zmirou, des doutes « scientifiquement raisonnables » ont été confirmés par un certain nombre de rapports concernant, notamment, l’usage du portable. Aucun rapport n’a remis en cause l’hypothèse d’une sensibilité particulière des enfants dont la boîte crânienne n’est pas encore totalement consolidée et le système nerveux pas totalement formé.
Nous avions donc un rôle d’alerte à assurer. Nous l’avons exercé, sans jamais, outrepasser, ni dans les actes, ni dans les déclarations, notre mission citoyenne légitime.
Nous avons reçu au cours de cette action de nombreux soutiens de nos adhérents, et nous tenons à les en remercier.
Nous avons, à cette occasion, et c’est sans doute la première fois que ce fut aussi spontané, reçu également le soutien d’un certain nombre de députés et sénateurs ( et parmi eux, quatre anciens ministres et l’actuelle présidente du groupe Santé-Environnement à l’Assemblée qui a porté le projet de charte de l’environnement jusqu’à son terme.
L’inaction gouvernementale et le silence des agences gouvernementales de veille et d’expertise en sont d’autant plus choquants. Nous avons obtenu plus d’écoute auprès des chaînes commerciales qu’auprès des autorités publiques en charge de santé.
Depuis plusieurs mois, les informations scientifiques émanant de programmes de recherche tout à fait officiels, lancées soit à l’initiative de l’OMS, de l’Europe ou encore de tel ou tel gouvernement ne sont connus en France que grâce à nos deux associations. L’exemple le plus consternant en est sans doute le programme REFLEX.
Dans un premier temps (dans les premiers jours de janvier 2005), nous prenons connaissance d’un bulletin rédigé par l’Ambassade de France à Berlin et daté du 15 décembre 2004, qui titrait « Les téléphones portables soupçonnés de provoquer des dommages sur le patrimoine génétique ». Ce bulletin faisait référence à une étude menée par une équipe de recherche berlinoise et concluait que « ces résultats sont inquiétants car ils n’infirment pas l’hypothèse d’une relation entre les rayonnements des portables et l’apparition des cancers ». Il s’agit d’un bulletin officiel émis par des services français. On peut donc faire l’hypothèse qu’il a été porté à la connaissance du ministère de la Santé, pourtant celui-ci est resté sans réaction. Il faut dire que lorsque nous avons lancé des recherches pour savoir exactement ce qu’était cette étude et ce qu’elle disait, on s’est rendu compte qu’il s’agissait d’un programme de recherches européen impliquant 12 équipes, parmi lesquelles celle de Bernard Veyret à Bordeaux. Celui-ci était en première ligne pour faire connaître ces résultats mais, il faut savoir qu’au sein des équipes qui ont développé des recherches, l’une d’elles n’a rien trouvé et, comme par hasard, il s’agit de la sienne. De là à dire que le programme REFLEX confirme qu’il n’y a pas de risque, comme il l’a laissé entendre, lors d’une réunion internationale, quelques mois avant la conférence de presse du Professeur Aldkoffer, coordinateur de la recherche (voir pages scientifiques de ce numéro), il n’y a qu’un pas, antiscientifique, qu’il a osé franchir.
L’appel aux parlementaires
Face à ce silence obstiné du Ministre de la Santé et du Directeur général de la Santé, nous avons saisi les parlementaires. Au moins quatre questions écrites ont été posées au Ministre, nous attendons avec impatience ses réponses. Le Babymo est, en effet, l’exemple paradigmatique des excès qu’entraîne la déréglementation d’un secteur alors même que la santé publique est en cause.
Certains parlementaires l’ont d’ailleurs compris qui ont repris, dans la proposition de loi que nous vous transmettons avec ce numéro de La Lettre nos revendications tant en termes sanitaires que pour tout ce qui concerne la transparence et ce qu’il est courant maintenant de nommer la « démocratie participative ». Ils ne sont pas les seuls à avoir agi et réagi de la sorte. Plusieurs députés britanniques œuvrent actuellement à la promulgation d’une loi qui tienne compte de l’état des connaissances scientifiques et des demandes des riverains d’antennes. Ils sont déjà 34, appartenant à divers groupes politiques, à avoir signé cette proposition (voir article ci-contre). En Belgique, ce sont les députés du groupe socialiste qui ont tenté de s’opposer, par la loi, à la commercialisation sur leur territoire du Babymo.
Nous devons aider maintenant l’initiative de nos parlementaires. Chacun de nous doit saisir son député afin qu’il apporte son soutien à la démarche initiée.
L’action des députés britanniques (article « Andrew Stunell »)
Le Babymo n’est même pas conforme à la réglementation nationale en vigueur
Le dossier Babymo est d’autant plus difficile à plaider pour la société distributrice qu’il s’avère non seulement en contradiction avec des mesures de prudence minimales, mais aussi qu’il apparaît comme non-conforme au décret du 8 octobre 2003 qui fixe les informations obligatoirement jointes à l’appareil.
Par un constat d’huissier dressé en date du 11 mars à la demande des deux associations Agir pour l’environnement et Priartem, nous avons pu démontrer que le Babymo ne comportait aucune des informations ou conseils d’utilisation réglementaires.
Pour disposer d’informations sur les conditions d’utilisation, il faut avoir l’idée, soi-même, de consulter un site belge (MyMoShop.be) qui définit les conditions optimales d’usage du Mymo. La page s’intitule « Mymo et la santé de votre enfant » et, là, si la santé de votre enfant justement vous soucie quelque peu, vous décidez immédiatement de ne pas l’acheter !
En effet, voici ce qui apparaît
en date du 22 mars 2005. "MyMo" et la santé de votre enfant !
« Il n’existe pas encore d’études abouties qui interdisent l’utilisation du GSM par les enfants (4 à 10 ans), mais le principe de précaution nous amène à considérer que tout abus ou méconnaissance des dangers pourraient avoir des effets néfastes sur la santé de votre enfant.
De nombreuses enquêtes ont déjà démontré les dangers que peut avoir un usage intensif du GSM chez les enfants et les adolescents de moins de 16 ans*.
Nous profitons de cette occasion pour rappeler quelques précautions en matière d’utilisation de "Mymo".
"MyMo" est un GSM qui permet à votre enfant, à tous moments, de prendre contact avec vous pour vous avertir d’un problème, d’un danger ou encore d’un retard et vice-versa.
"MyMo" ne doit en aucun cas servir à de longues conversations.
"MyMo" ne possède pas de clavier et les parents peuvent ainsi préprogrammer uniquement les numéros nécessaires à la sécurité de leur enfant.
Tous les correspondants préprogrammés doivent, dès lors, être conscients que les conversations doivent rester les plus brèves possibles.
Le port de "MyMo" autour du cou doit rester occasionnel et nous encourageons les parents à apprendre à leurs enfants à utiliser l’oreillette plutôt qu’à monter l’appareil à l’oreille lors des conversations. Cette pratique permet de limiter l’exposition du cerveau de votre enfant aux ondes électromagnétiques**.
"MyMo" est donc un appareil à utiliser dans des situations qui permettent d’augmenter la sécurité de votre enfant***.
Nos (dé)Conseils :
- - Nous déconseillons l’utilisation de "MyMo" au-delà de 6 minutes par jour.
- - Nous déconseillons le port (autour du cou) de "MyMo" en continu.
- - Nous déconseillons l’usage de "MyMo" dans la voiture.
- - Nous déconseillons de garder "MyMo" allumer à la maison quand votre enfant est avec vous.
- - Nous déconseillons de dormir près de son "MyMo" allumé.
- - Ne faites pas de "MyMo" un outil de communication, il a été conçu pour améliorer la sécurité et pour vous rassurer.
Respectons ces principes de prudence. »
* Faits établis sur l’utilisation des téléphones mobiles ** Téléphones portables, le danger potentiel... *** Mobile Phones and Health (UK) - Chapitre 6. A precautionary approach (PDF, 101 KB, 19 pages) © copyright 2004-2005 - itcbiz.com - Tel : 00 32 2 740 08 17 - Email : gc@MyMoShop.be -
Les (dé)conseils de Priartem :
« Nous déconseillons l’utilisation de « Mymo » au-delà de 6 minutes par jour ». Rappelons à ce propos que le Babymo était commercialisé en France dans les mêmes conditions que n’importe quel portable. Ainsi, Orange proposait un forfait de 2 heures par mois qui réduisait le prix d’achat du Babymo à 1 euro. Comment alors s’assurer qu’un jeune enfant qui par définition ne sait pas lire l’heure ne va pas dépasser les 6 minutes par jour !
« Nous déconseillons le port autour du cou en continu. » Comment faire porter un Mymo par un enfant en toute sécurité. Rien n’en est dit.
« Ne faites pas de Mymo un outil de communication, il a été conçu pour améliorer la sécurité et pour vous rassurer. » Voilà encore un conseil qu’il est aisé de transmettre en consigne d’utilisation à un jeune enfant !!!.
Quant à l’utilisation du kit oreillette, chacun jugera de l’efficacité de ce genre de conseil donné à des enfants de 4 ans...
Boite 64 - 206 quai de Valmy - 75010 Paris
Tél : 01 42 47 81 54 - Fax : 01 42 47 01 65 - Contactez-nous
Mentions légales - Site réalisé sous SPIP par One2net
Site référencé par :